About sensibility
Oui, parlons-en, de votre foutue sensibilité, à vous tous. Moi, je suis insensible, donc bon, on me pardonne si je capte rien.
Mais vous ! Vous qui êtes "à fleur de peau" (quelle jolie expression, n'est-ce pas ! ), vous qu'un rien suffit à anéantir, vous que je détruis si vite et si inconsciemment.
Vous qui me répétez qu'il faudrait que je fasse un peu attention aux autres. Vous qui me lancez un regard réprobateur parce que j'ai parlé, parce que j'ai "mis les pieds dans le plat".
Vous qui vous offusquez que je vous balance dans la gueule que je n'en peux plus, de votre hostilité. Vous qui me contredisez (mais pas assez énergiquement, hélas) quand je pleure, parce qu'il faudrait quand même pas qu'on inverse les rôles, hein. C'est vous qui morflez, faudrait pas l'oublier...
Eh bien vous, vous qui avez la chance d'être nés sensibles, vous que la nature a doté de cette merveilleuse capacité à ressentir, remerciez-l'en, et faites bon usage de ce cadeau. Comprenez un peu qu'on puisse éprouver quelque chose derrière un regard dur. Rendez-vous compte que derrière un silence pudique, il peut y avoir autre chose que de l'indifférence.
Moi, je suis heureuse. Bien sûr. Mais comme pour pas mal de monde sur cette planète, mon bonheur n'est pas total et sans failles. J'ai mes "jours sans", vous avez votre mal de vivre. La même rupture va vous plonger dans la déprime la plus totale alors qu'elle va me mettre un coup sans me mettre par terre, qu'à celà ne tienne, mais bordel, comprenez qu'en de telles circonstances je me mette de côté, et ne venez pas me dire qu'à ce moment, moi, j'étais heureuse, car indifférente à ce qui arrivait.
Lâchez-moi avec vos effusions de larmes, vos allusions suicidaires, votre chantage affectif, vos silences lourds de sous-entendus, et vos phrases en suspends ! J'en peux plus, moi. Je peux plus les supporter. Moi, vous savez, je suis un peu épaisse, faut tout me dire. Ça me fait du bien, à moi, de tout dire. Et puis c'est clair. En plus, vos machins, je peux pas les comprendre. Faudrait pas perdre ça de vue, hein.
Moi, j'aimerais bien, pleurer beaucoup et à la demande. J'aimerais bien. Mais voilà, parfois, ça fait mal, et les larmes ne viennent pas. En plus, j'aime pas beaucoup ça, pleurer.
Mais je peux pas. Je suis pas faite comme ça. J'ai pas pris l'habitude, j'en sais rien. Et je suis pas sûre de vouloir apprendre. Et puis je me dis que je vous sers un peu. Vous avez l'air encore plus malheureux, à côté de moi.
Ne vous appitoyez surtout pas sur mon sort, ça m'énerve. Mais foutez-moi la paix. Juste ça. Laissez-moi avec mes souvenirs, mes illusions, mon foutu optimisme inébranlable, mes idéaux, mes utopies. Et ne revenez pas voir si je pleure bien, ça veut rien dire.